Je ne veux pas savoir comment tourne le monde, ce qui le menace, ce à quoi il échappe. Je veux vivre et c’est tout.
La fin du monde est annoncée. Les scientifiques en sont certains et sont même en mesure de révéler la date avec précision. Que fait-on lorsque l’on sait la fin certaine ? Comment occupe-t-on son dernier temps de vie ? Une période de vertige et de liberté s’ouvre pour les personnages de cette dystopie. Tout devient urgent. Parmi eux, une jeune femme dont le terme de sa grossesse est prévu pour après la fin du monde. Elle accélère alors le temps et accouche d’un enfant déjà homme, le Pressé de vivre. A peine né, elle le jette au monde pour qu’il puisse découvrir la vie, ne serait-ce que quelques heures. Avec ivresse.
Mais la fin du monde n’a finalement pas lieu. Les gens se réveillent, hagards, et, à leur grande surprise, tout continue. Comment revenir à la vie après une période intense d’euphorie ?
Au petit matin, dans le ciel de l’aube, un nuage d’étourneaux apparaît. Tout le monde croit qu’il va danser dans le ciel et faire des volutes étranges, mais les oiseaux se mettent à tourner sur eux-mêmes comme une colonne vivante, puis s’entre-dévorent dans un vrombissement de carnage. Ça commence là. Plus personne ne peut le nier et nos visages se creusent. Le même jour, des dizaines de chats errants se jettent sous les pare-chocs des voitures. Une sorte d’agitation fébrile parcourt le monde animal. Est-ce qu’ils savent, eux aussi ? Est-ce qu’ils sentent dans leurs corps ce que nous avons compris par nos calculs ? Tout devient nerveux. Les chiens gémissent, tournent comme des fous sur eux-mêmes en essayant d’attraper leur queue. La lumière de cette journée – et de toutes celles qui vont suivre – est étrange, tantôt irradiante, tantôt voilée. Parfois les nuages s’embrasent de lueurs rouges, parfois ils sont si sombres et si lourds qu’ils semblent sur le point de s’écraser à terre. La peur monte. Le monde tremble. Il y a une chose qui devient sûre. Nous le sentons : “C’est la fin du monde.” Un long chuchotement parcourt l’humanité. “La fin du monde, oui…” Alors nous levons les yeux au ciel et dans les rues, qu’il fasse jour ou nuit, de peur ou de ferveur, que ce soit pour s’oublier ou pour conjurer le sort, nous nous mettons à danser.